Dans une vaste salle au 2ème étage du CAPC, une dizaine d’enfants sont occupés. Plusieurs d’entre eux sont autour d’une grande table. Accompagnés de leur crayon, ils réfléchissent devant leur feuille. Ils dessinent des personnages, des paysages, des animaux ... Météorites, robots, extraterrestres, téléphone sont visiblement le futur qu’imaginent les enfants d’après leurs dessins. Pour s’exprimer certains préfèrent user de mots. Ils écrivent des lettres où ils posent des questions sur l’avenir.
A côté un bruit désagréable s’amplifie, d’autres enfants utilisent une manière différente pour s’exprimer : la gravure. Casque anti-bruit sur la tête et stylo graveur en main, les enfants marquent à jamais les capsules temporelles. Quatre styles de capsules différentes ont été réalisées. Une pyramide en inox, un pavé droit en inox avec des flotteurs, une capsule en plexiglas avec plusieurs étages et une capsule en acier galvanisé ayant pour apparence une spirale. Bonbons, gâteaux et boissons tiennent compagnie aux personnes participantes à l’animation.
Soudain, des animatrices du centre socio-culturel GPinten6T demandent l’arrêt des gravures. Elles vont enregistrer en vidéo une fratrie de 5 sœurs. Les jeunes filles ont donné leur nom, leur âge et leur vision sur le monde dans 50 ans devant l’objectif de la caméra. Au fil des heures, des jeunes adultes se sont joints au projet. Après avoir gravé quelque chose sur les capsules, ils partent en criant : « A dans 50 ans ! »
Une thématique unie toutes ces personnes : penser le musée et la vie dans 50 ans.

Un jeune garçon, doté d’un casque anti-bruit, réalise une gravure.

Guillaume Segond est un artiste qui a fini l’école des Beaux Arts de Bordeaux en 2015. Passionné par la création de formes, il devient sculpteur et travaille avec de la céramique et du plâtre, afin de « faire cohabiter le présent et le passé pour dire le futur ». Cette semaine, il est l’artiste qui porte le projet : «  Imaginons le CAPC dans 50 ans  ».
Plusieurs contraintes s’imposent alors à cette initiative. La première correspond à ces barres métalliques dans le puit où résideront les capsules pendant 50 ans. Dans une allée du CAPC, il y a une œuvre d’Anish Kapoor, un plasticien et sculpteur britannique, qui n’est pas présente tout l’année. Pour pouvoir installer l’œuvre, un puit a été creusé dans le musée. A l’intérieur, deux poutres métalliques, qui se croisent, permettent de soutenir l’œuvre. C’est ici que les capsules seront accrochées avec des pinces crapauds.
Mais le souhait initial de l’artiste, Guillaume Segond, était de réaliser une grosse capsule temporelle, « il a donc fallu réfléchir autrement ». La solution ? Fragmenter le tout en plusieurs petites capsules. L’humidité, la corrosion et la résistance des matériaux sont aussi des facteurs à prendre en compte pour la réalisation du projet. C’est pourquoi le choix des matériaux tel que l’inox, le plexiglas, l’acier galvanisé et l’utilisation de flotteurs a été réfléchi en amont pour que les capsules résistent dans le temps. «  L’idée c’est que tout le monde puisse prendre part au projet, en apportant un témoignage le plus large possible avec de toutes les origines et tous les âges », a déclaré Guillaume Segond.

Flotteurs et différentes capsules.

Pour avoir une sauvegarde de tous les documents. Ils seront numérisés, puis cryptés et stockés, pendant 50 ans également, aux archives de Bordeaux. Vous aurez la possibilité de voir les capsules pour la nuit du musée. De la médiation sera également faite. Mais il faudra attendre le week-end de célébration du 50ème anniversaire du CAPC, les 23 et 24 septembre 2023 pour les enterrer.
« Ça n’arrive pas tous les jours de faire une capsule à grande échelle dans un musée, venir participer à un projet rare et d’inscrire un message dans le temps. Il n’y a pas que les artistes qui peuvent exposer, venez mettre votre pierre à l’édifice », encourage Guillaume Segond.