Jeanne et Gédéon

Jeanne et Gédéon : Chapitre V

Jeanne et Gédéon vivent ensemble depuis si longtemps, qu’ils ont tout oublié. Mais Jeanne disparait, emportée par d’étranges créatures, et Gédéon va apprendre qu’ils ne sont peut-être pas ce qu’ils croyaient être ! 5ème et dernier chapitre

Cette idée fit bondir Gédéon, non, personne ne pourrait remplacer sa Jeanne. Il remercia la praticienne bien intentionnée, et après avoir acquitté son dû, il regagna son logement. Arrivé chez lui, il était l’heure de partir travailler. Il prit sa camionnette pour se diriger vers son chantier. Il escalada une longue échelle et rendu sur le toit, il commença à arranger les tuiles déplacées par le coup de vent de la semaine précédente. Bientôt le soleil descendit vers sa tanière mystérieuse, caressant les toits de Bordeaux de ses rayons obliques. Il était temps de rentrer. Il reprit le chemin du retour et sa besogne qui l’avait jusqu’ici bien absorbé, se dilua pour laisser la place à l’absence douloureuse de Jeanne. Il s’assit un instant sur le canapé devant la fenêtre. Un rituel journalier se mit en place comme depuis le jour où il avait atterri sur notre planète. Après quelques minutes, il sortit dans le jardin. Son regard soudain plus clair, avec d’étranges gestes saccadés, il ouvrit la porte de la cabane à outil.

À l’intérieur ; malgré la petitesse du bâtiment en bois, une autre porte, celle-ci en métal, l’attendait. Il tendit sa main et la porte s’ouvrit sur un lieu plutôt étroit. Au centre, un grand fauteuil très profond sur lequel il prit place. Aussitôt des tuyaux métalliques vinrent se ficher directement dans sa nuque et en bas de sa colonne vertébrale. Alors ses paupières s’abaissèrent et un œil surgit d’on ne sait où, pour s’ouvrir au milieu de son front. Une musique country s’éleva, un sourire se dessina sur ses lèvres et il sembla dormir bien que l’œil restât ouvert.

... Pendant ce temps, Jeanne écoutait Caramba le robot avec attention.

- Oui, ma chère Jeanne, un jour, un de ces Gédéniens est venu, vous vous êtes enfuis tous les deux.

- Voilà, c’est tout.

- C’est tout ! vraiment ! où sommes-nous allés ?

- Et bien nulle part ! ils vous ont retrouvé aussitôt, vous n’aviez pas eu le temps de décoller et vous avez été jugés.

- Jugés et pourquoi, qu’avions-nous fait de mal ?

- Mais voyions vous étiez tombés en alliance sentimentale ! c’est interdit entre races !

- Alliance sentimentale, tu veux dire amoureux !

- Si tu veux ! ici on dit alliance sentimentale.

- Pourquoi je ne m’en souviens pas ?

- C’était la condition, ils vous ont exilé sur une planète, en l’occurrence la terre, c’est la plus proche, ils vous ont effacé la mémoire et ils vous ont dispersé sur la surface du globe. Toi tu as perdu la vue et lui il doit se recharger tous les soirs pour survivre. Bien sûr, il ne sait pas lui-même qu’il doit passer à la machine, cela se fait malgré lui, et malgré toi puisque tu ne peux pas le voir !!

Ils vous ont observé et ils ne se l’expliquent pas, mais vous vous êtes retrouvé et vous vous êtes marié ! Et cela à chaque fois. On t’avait attribué une fausse mère, une Jeanne un peu usée qui détestait ce rôle et Gédéon avait un voisin qui veillait sur lui, un lévrier écossais, aussi appelé Scottish Deerhound, un faux bien sûr, en fait c’était un Gédénien. Voyant que votre union subsistait malgré tous les obstacles, ils ont décidé que cela devait finir. Ils t’ont rapatrié et te voilà chez nous. Tu es heureuse j’espère !

- Pas du tout, je veux mon Gédéon !

- Ouais, je m’en doutais. Ils sont en pleine délibération. Vous ne pouvez pas rester sur terre, cela commence à se voir que vous n’êtes pas comme les autres. Et les dirigeants de vos deux planètes ont des projets pour vous.

- Tais-toi Caramba !!

L’injonction venait d’une Jeanne à la voix puissante. Elle était plus grande que les autres Jeannes. Elle avait surgi derrière eux comme venue de nulle part. La petite Jeanne perdit connaissance.

...

Gédéon sortit de la cabane en bâillant. Devant la porte un Gédénien l’attendait. Il ne ressemblait pas à Gédéon, il était très grand, le teint très pâle et les cheveux roux. Il portait un étrange Kilt à la texture de métal sur un polo gris angora. Il accueillit Gédéon avec un large sourire.

- Mon frère, te voilà !
Alors la mémoire de Gédéon lui revint d’un coup. Saisi de vertige, il tomba dans les bras du visiteur.

- Holà ! ça va ? Je viens te chercher, on part sur Balachon ; la planète la plus éloignée du système solaire. Allez ! on y va ! tu vas retrouver Jeanne. Et vous pourrez y vivre votre lien sentimental pour toujours et sans entrave cette fois. Vous avez fait la preuve que vous ne pouviez pas vous passer l’un de l’autre alors après ces 1560 ans d’âge gédénien, ils vous libèrent. Vous avez purgé votre peine.

Gédéon jubilait, les souvenirs affluaient, il allait retrouver « Sa » Jeanne !

Ils embarquèrent dans un grand vaisseau planté au milieu du jardin. La porte était déjà ouverte depuis un bon moment.

- Tu sais que tu ne pourras plus jamais revenir sur terre. Techniquement ce sera impossible, tu sais pourquoi.

- Oui, je sais à cause du bouclier.

- Oui, exactement.

Le vaisseau se souleva sans bruit et dans un éclair ils se retrouvèrent sur la surface de Balachon.

Le côté sombre de la planète si loin du soleil ne l’était pas du tout, au contraire, les Gédoniens très futés alliés avec les Jeannes avaient détourné la lumière d’un autre astre vers la planète lui conférant une luminosité éclatante ainsi qu’une végétation luxuriante puisque de l’eau y avait été synthétisée. Un climat tropical s’était rapidement établi. La petite Jeanne qui avait été mise au courant du déroulé de sa vie fut mise en présence de son Gédéon. À peine débarqués, ils coururent l’un vers l’autre pour s’enlacer. Il y eut un silence ému dans l’assistance. Tout finissait bien, l’amour avait triomphé. C’est alors qu’une petite voix timide s’éleva au milieu de ce recueillement de satisfaction.

- Coucou, heu... je crois qu’il y a un petit souci, nous on voulait juste voir ce qu’il y avait dans le truc au milieu du jardin de notre pote Gédéon.

Tous se retournèrent pour découvrir tous droits sortis de la capsule ; debout, un peu tremblants, Georges le voisin et Poilu son copain de rugby !

FIN

Ecrit par Marie-Laure Bousquet

Rédactrice à Bordeaux-Gazette, elle intervient le plus souvent dans les rubriques sur le théâtre. Elle alimente la rubrique « Et si je vous racontais » avec des nouvelles fantastiques ou d’anticipation. Elle est aussi l’auteure de plusieurs romans : Les beaux mensonges, La fiancée du premier étage, Madame Delannay est revenue, Le voyageur insomniaque, Enfin seul ou presque, Raid pelotes et nébuleuses. D’autres romans sont à venir. https://www.amazon.fr/Marie-Laure-BOUSQUET/e/B00HTNM6EY/ref=aufs_dp_fta_dsk


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