Bordeaux

Le portrait d’artiste : une individualité marquée ?

Nombreuses sont les statues consacrées aux artistes liés à la ville de Bordeaux. La plupart se trouvent au Jardin Public (l’article se concentrera sur celles-ci), d’autres sont un peu plus cachées (Francisco Goya, au 1 rue Mably, en face de l’église Notre-Dame...). Toutes possèdent un point commun : un mode de représentation unique et personnalisé. Le caractère individuel de l’artiste est mis en avant, rendant chacune de ces sculptures différentes les unes des autres.



Entrons ensemble dans l’univers des ces artistes à travers leur portrait de pierre. Afin de mieux cerner l’individualisme de ces figures, commençons par regarder les types de représentation « classiques ». Les exemples les plus connus sont la statue de l’Intendant Tourny sur la place du même nom, ainsi que celle de Jacques Chaban Delmas située à côté de la cathédrale Saint-André. Ces deux monuments sont similaires dans le choix de la position du sujet, et dans ce que celle-ci incarne : une jambe en avant, le bras tendu et ouvert à nous. Le corps est dynamique, en action. La notion de progrès, déjà présente dans la société, lors de la réalisation de la statue de Tourny en 1825, est incarnée par ces hommes perçus comme des visionnaires et ambitieux. Ce type de représentation est donc très courante lorsqu’il s’agit de portraiturer un homme politique ou un personnage ayant marqué la ville, et s’inscrivant dans une vision progressiste.

Carles Vernet

En ce qui concerne les artistes, certains modèles sont récurrents, cependant la diversité des portraits est plus forte, et s’amplifie avec l’évolution de l’art contemporain. Le premier cas étudié est celui de Rosa Bonheur (1822-1899), dont la mémoire est inscrite dans la pierre grâce à Gaston Veuvenot-Leroux depuis 1910. La peintre bordelaise, ayant pour thèmes de prédilection les animaux et les paysages, est à son aise au sein du Jardin Public. Son métier est reconnaissable de part la palette qu’elle tient dans sa main gauche, néanmoins ceci ne définit pas le caractère de la statue. Son charisme élégant est perceptible à travers son regard, sa position assise, son âge vieillissant, et ses habits masculins qu’elle avait pour habitude de porter. Elle fut un des piliers du féminisme de son époque, et reçut la légion d’honneur en 1865, une première pour une femme. Le deuxième cas est celui de Carles Vernet (1758-1836), lui aussi peintre animalier. Sa sculpture, réalisée par Raymond Martin et fondu (bronze) par Eugène Rudier en 1948, montre le peintre en action. Son corps et son regard sont tournés vers l’une des entrées du Jardin Public, tandis qu’il tient sa palette et appuie sa jambe sur un rocher. La torsion de son anatomie ne s’inscrit pas dans une démarche de le rendre noble, ou majestueux comme la majorité des statues hommages. Il est présenter de manière singulière et dynamique.

Passons aux écrivains, Jean Fernand-Lafargue (1856-1903) et Léon Valade sont tous deux illustrés sous la forme d’un buste accueillant sur leur stèle des figures humaines. Fernand-Lafargue est entouré de ses personnages : le garde-chasse landais et la vendangeuse médocaine. Sa voix littéraire étant le roman de mœurs, ses histoires décrivent des milieux sociaux particuliers, dont la campagne aquitaine. Des éléments tels que les vignes et les pins qui encerclent les protagonistes, évoquent le décor de son roman. La proportion (en taille), entre le buste et la partie exposant son œuvre fictionnelle, laisse à croire que le sculpteur Jules Rispal privilégie la mise en avant de l’oeuvre par rapport à l’artiste. Mais ceci reste à confirmer. Léon Valade, lui, est portraiturer auprès de deux figures féminines, qui portent sur elles les blasons de Paris et Venise, villes appréciées par le poète. Ici, les goûts personnels de l’artiste sont mis en lumière, le lien avec ses œuvres est indirecte, ce qui le différencie du buste précédent. En revanche, l’expression faciale des deux écrivains est semblable, puisqu’ils esquissent un sourire. Leur douce expression les rendent plus humains, accessibles. Pour finir, dirigeons nous vers le sud du Jardin Public pour rencontrer François Mauriac (1885-1970). Celui-ci est scindé en deux, perplexe, laissant apparaître le dilemme auquel Mauriac fut confronté toute sa vie : sa croyance chrétienne remise en question par les conflits armés. Le sculpteur Ossip Zadkine, est allé encore plus loin dans la personnalisation de la représentation. Il montre aux yeux de tous, pas seulement le monde créatif de l’artiste, mais son monde intérieur. L’individu est au premier plan

François Mauriac

Sources :
Annick DESCAS, Dictionnaire des rues de Bordeaux, Ed. Sud-Ouest, 2008.
Bernard TOCHEPORT, « Bustes et statues du jardin public à Bordeaux : Hommage à des personnalités marquantes de la ville » [article], Site 33-bordeaux.com.
Gisèle Sapiro, « Salut littéraire et littérature du salut » [article]. « Deux trajectoires de romanciers catholiques : François Mauriac et Henry Bordeaux », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, 1996, p.36-58.
Site du Musée d’Aquitaine
P. LAPASSADE, « Structure d’une œuvre », Artes visuales EIFB, 2010-2011.


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