Bordeaux
Natif de la région agenaise, en 1900, Pierre Molinier fut très actif au moment de la création des « Indépendants bordelais ». Impliqué dans l’organisation et les accrochages, il exposa une vingtaine d’huiles sur toile dès le premier Salon de 1927.
Les Indépendants bordelais
Ils font partie du paysage artistique bordelais pour avoir cherché, avec énergie et talent à en rabattre les cartes à une époque où la ville s’abandonnait au joug implacable et rassurant du système « Beaux-Arts ».
L’une des figures les plus connues de ce mouvement de jeunes frondeurs inspirés par Dada et les Surréalistes est sans conteste Pierre Molinier. Sésame d’une modernité destinée à libérer Bordeaux du carcan imposé par les « artistes officiels » de l’entre-deux guerres, le premier Salon des Indépendants bordelais se tint en 1928 dans l’Orangerie du Jardin-Public.
Mouvement rebelle qui prône la seule nécessité de l’art pour l’art et refuse tout jury. Interrompu par la guerre, le mouvement se répartit en plusieurs chapelles après le schisme et la scission de 1955.
« Le maître du vertige »
Lors de la création du mouvement des Indépendants bordelais, Pierre Molinier qu’André Breton qualifiera plus tard de « maître du vertige » s’applique à peindre non sans talent ni sensualité des paysages et des portraits.
Il faudra attendre les années 1950 pour que Molinier devienne selon l’expression poétique de Breton : « L’échelle de soie jetée du monde des songes à l’autre ».
- © Pierre Molinier
Le scandale …
Un premier tournant suite à une rencontre avec des émissaires du Dalaï-lama l’oriente vers l’ésotérisme et le peinture magique. Le scandale qui allait forger le mythe Molinier intervint en 1951 avec l’exposition au Salon des Indépendants de son premier tableau à connotation érotique, « Le Grand Combat » présenté fort habilement derrière un voile faussement pudibond afin de ne pas heurter les âmes sensibles.
Au tout début des années 60, Pierre Molinier repéré par les « pontes » du Surréalisme va participer aux manifestations du groupe et effectuer ses premiers photomontages à l’instar de Max Ernst ou de Duchamp. Dans ces « mécaniques illusoires », il enchevêtre à partir de photographies d’éléments travestis et découpés de son propre corps, les genres masculin et féminin, exprimant son culte de l’androgynie et son fétichisme des jambes. Il est ainsi reconnu comme précurseur des pratiques artistiques tournées vers les revendications identitaires.
Un recueil de ses œuvres
Pierre Molinier va travailler à l’édition d’un recueil de ses œuvres, photos et peintures, ses principales inspiratrices sont alors la romancière Emmanuelle Arsan (auteure d’Emmanuelle) et une étudiante aux Beaux-Arts, Hanel Koeck, dans « belles dames dévorantes » qui prêtent leurs visages, leurs bras ou, mieux, leurs jambes aux combinaisons jubilatoires du « petit diable de Bordeaux ».
Son prévisible suicide …
Celui qui avait érigé sa « tombe prématurée » dès 1950, estimant avoir fait son temps, se donna la mort le 3 mars 1976, d’un coup de pistolet à son domicile de la rue des Faussets.
En hommage à cet artiste pas vraiment assumé par sa ville, souvent décrié mais néanmoins talentueux et créatif, une place de notre ville dans le quartier Saint Michel, entre rue Maubec et rue de la Fusterie porte désormais son nom et lui rend hommage.
(Source : 101 objets et symboles qui racontent Bordeaux).

Ecrit par Dominique Mirassou
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