Hypocrite, je ne l’ai pas été, quand j’ai marché pour Charlie. Non, je ne lisais pas Charlie Hebdo. J’avais entendu parler de cet hebdomadaire lors des premières caricatures de Mahomet lorsque j’avais 10ans. Je n’en ai plus jamais entendu parler depuis, ou brièvement. Non, je n’oublie pas le reste du monde, comme les 2 000 personnes tuées au Nigéria dont j’ai également porté le deuil dimanche.
Mais je n’ai pas été hypocrite ni envers Charlie, ni envers ces milliers de morts.
Je ne suis pas hypocrite parce que derrière Charlie Hebdo, il y a notre modèle et notre territoire. Et que cette attaque est bien plus qu’une attaque contre un journal, c’est à la France et à tous les français que les terroristes s’en sont pris.
Plus que Charlie, les terroristes ont attaqué notre liberté d’expression et notre modèle démocratique. Aujourd’hui, la France blessée, en plus de compter ses morts, pleure ses idéaux. Mais notre pays ne s’est pas laissé faire, il continue à se battre pour la liberté d’expression. Et dimanche, nous l’avons exprimé, exalté, chantant la Marseillaise. Dimanche, nous assistions au plus grand rassemblement jamais réalisé depuis la libération de la France. Et nous disions « Nous sommes français ». Cela faisait bien longtemps qu’on n’avait pas entendu cette phrase prononcée aussi fièrement. Oui, nous sommes la démocratie française, nous sommes le peuple français, nous sommes un symbole de la liberté d’expression.
Plus qu’à des hommes, les terroristes se sont attaqués à la France. Une attaque d’une ampleur jamais commise sur le sol français. Alors s’il ne faut pas oublier les autres malheurs du monde, celui de Charlie me touche plus, c’est mon pays, mes concitoyens. Et si nous ne nous mobilisons pas dans notre pays pour éradiquer la vermine terroriste, comment prétendre la neutraliser ailleurs. « Ils ont voulu nous mettre à genoux, la France est debout » arborait fièrement la foule de manifestants partout en France. Oui cette semaine nous voulions bouter les terroristes hors de notre territoire avant d’aller les combattre ailleurs.
S’il y a des hypocrites aujourd’hui ce ne sont pas les français, qui se sont rassemblés d’instinct pour défendre leurs droits. Mais ce sont certains de nos représentants, dont les querelles ont porté atteinte à l’unité nationale. Le Front National, qui s’est auto-exclu de la manifestation, Nicolas Sarkozy, qui s’est invité au premier rang de la manifestation, afin qu’on parle d’eux, n’ont pas respecté l’engagement des français dans ce combat contre le terrorisme.
Je ne suis pas hypocrite. Aucun des quatre millions de français qui se sont présentés à la manifestation ne l’était. Je ne me suis jamais sentie aussi vraie. J’ai 20 ans, je suis française, je suis laïque et je suis Charlie.