Blaye
Un peu d’histoire géo : Nouvelle Aquitaine, région administrative crée par la réforme territoriale de 2015 ; quatrième région sur dix huit ; 5,987 millions d’habitants pour 84061 km². D’une diversité de paysages exceptionnels : dune du Pilat, grottes de Lascaux, Ile de Ré, Rhune, Estuaire de la Garonne, centrale nucléaire de Blaye… et en cadeau de cet élargissement de la région Aquitaine, la centrale de Civaux dans la Vienne.
Petits veinards que nous sommes, deux centrales pour nous tous seuls :
- - la Viennoise, une des petites dernières de la vingtaine de sites nucléaires français, à 34 km de Poitiers. Si Aliénor voyait ça, elle se retournerait dans sa tombe !
- - et une vieille dame de 38 ans déjà, Blaye.
Précisément, le 20 mars 2019, un séisme de magnitude 4.9, « incongru » d’après le C.E.A., était ressenti sur les trois départements des Charentes, Charente Maritime et Gironde, dans une région pas spécialement connue pour son activité sismique. L’épicentre étant situé à une trentaine de kilomètres de la centrale nucléaire, on est en droit de se poser des questions sur la résistance de cette structure déjà ancienne, mise en service en 1981. D’autant qu’une réplique de 3,6 se faisait de nouveau sentir le 6 avril dernier, dans le même secteur … et peut-être d’autres à venir, certes plus faibles à en croire le Bureau Centrale de Sismologie.
Si la probabilité des risques sismiques est moindre en France qu’au Japon, la protection antisismique de nos centrales paraît l’être tout autant.
- Les différentes centrales nucléaires en France
- (NB : le réacteur de l’Institut Laue-Langevin n’apparaît pas sur cette carte car il ne s’agit pas d’une centrale nucléaire).
© Idé https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/developpement-durable-nucleaire-centrales-francaises-sont-sures-mais-pas-assez-34719/
En 2001 déjà, l’Autorité de Sûreté Nucléaire revoyait le risque sismique à la hausse et demandait à EDF d’en tenir compte. Si l’on se réfère à un courrier du 27/06/2003 au fournisseur d’énergie : « Séismes et centrales nucléaires, [] EDF a falsifié des données sismiques ; l’entreprise a baissé d’office la valeur de l’intensité des séismes de référence. Il s’agit d’une falsification aussi incroyable que grossière », ceci afin d’éviter une mise aux normes onéreuse de certaines centrales.
En ce qui concerne le Blayais notamment ; mais également les centrales de Chinon dans l’Indre et Loire ; Belleville (Cher) pour laquelle EDF s’est autorisé à conserver comme référence un séisme de 1079, tout en écartant celui de 1933 dont la puissance aurait exigé des mesures de mise aux normes plus coûteuses ; Saint Laurent des eaux (Loire-et-Cher), qui figure dans la liste des incidents nucléaires à la date du 13/03/1980 pour une fusion du combustible au cœur d’un des réacteurs ; Fessenheim en Alsace ; mais encore Civaux dans la Vienne et Golfech (Tarn-et-Garonne)… soit plus de la moitié des réacteurs sur les cinquante huit qui quadrillent notre pays.
Ce non respect des recommandations de sécurité, venant pourtant de l’A.S.N, ne paraît pas avoir évolué d’avantage, même huit ans après la deuxième catastrophe nucléaire mondiale. Après Tchernobyl : Fukushima ! Cette constatation aurait de quoi inquiéter les Français. « EDF, en mauvaise posture financière, refuse toujours de réaliser les travaux nécessaires. Afin de combler son déficit, l’entreprise a même fait main basse sur des sommes prévues dans l’optique d’assurer la maintenance des structures nucléaires durant l’allongement de leur durée de vie de trente à quarante ans ! » déclare Stéphane Lhomme, Observatoire du nucléaire.
En effet, la majorité des centrales de l’hexagone atteignent l’âge de la retraite, mais comme beaucoup de Français à l’avenir, elles connaissent la mauvaise surprise d’être obligées de bosser bien plus longtemps !! A quel prix, celui du danger d’une catastrophe nucléaire à l’échelle de Tchernobyl ou Fukushima ?! Avant l’accident au Japon, un mythe de la sécurité s’était mis en place : « Doux confort de l’ignorance et de sa sœur l’obéissance ! » Nous n’en sommes plus là !!
Huit ans après , savez vous seulement ce que deviennent les victimes japonaises ? En 2016, est sortit au Japon le film : Fukushima, le couvercle du soleil, qui retrace la plongée au cœur du gouvernement nippon en crise, incapable de gérer l’ingérable. Extrêmement marqué par la catastrophe nucléaire du 11 mars 2011 qui dure depuis et pour longtemps, le premier ministre de l’époque, Naoto Kan, est devenu un antinucléaire fervent. Il met aujourd’hui son témoignage au service de la lutte pour la sortie du nucléaire .
Venu quelques jours dès la sortie de ce film en France (le 06 /03), sur l’invitation du Réseau** Sortir du nucléaire, Mr Kan a eu l’occasion de participer à quelques projections/débats au début du mois de mars. Pour ceux qui souhaiteraient comprendre la situation, une projection aura encore lieu dans notre région le 25 avril à Mont de Marsan : à ne pas rater !
- AFFICHE DU FILM : FUKUSHIMA , LE COUVERCLE DU SOLEIL
Quant à notre premier ministre Edouard Philippe, ancien avocat du droit des marchés et employé d’A.R.E.V.A ( fleuron de notre industrie nucléaire ! ), il y fut employé de 2007 à 2010 au fin de « s’assurer de la collaboration de parlementaires acquis au lobby de l’atome », si l’on en croit toujours le Réseau**. De là date sa réputation d’anti-écologiste, confirmée par ses oppositions à plusieurs lois en faveur de la transition énergétique, de la reconquête de la biodiversité...
Il paraît pourtant possible de réaliser cette transition, d’autres pays l’ont prouvé. Ainsi l’Espagne, pour seulement 20 % d’électricité d’origine nucléaire ( fournie par les sept réacteurs ibériques restant ), produit déjà 45 % d’énergie renouvelable. Sous l’œil attentif des militants antinucléaires de la péninsule (Mouvement Ibérique Antinucléaire).
Le prochain Forum Antinucléaire aura lieu à Madrid du vendredi 31 mai au dimanche 2 juin 2019 ; l’événement s’annonce à la fois constructif et festif… à suivre.
Les centrales vieillissent, les incidents surviennent…
Théodore Monod disait : « Je ne voudrais pas qu’on puisse dire dans 500 ans qu’il n’existait aucune forme de protestation contre un état qui s’enorgueillit de posséder l’arme atomique ».
*A revoir aussi la comédie de Kubrick, récompensée par plusieurs Oscars (1964), Dr Folamour (ou Comment j’ai appris à ne pas m’en faire et à aimer la bombe).
A lire aussi sur cette région du Japon, à jamais sinistrée, le bel ouvrage :
Vies à Vies, de Corinne Bret.
Après avoir vécu une trentaine d’années dans le pays du Soleil -Levant comme correspondante du journal libération ,vit actuellement sur le bassin d’ Arcachon.
L’auteur dans cet ouvrage met en parallèle notre bassin avec la baie de Kessenoma, près de Fukushima et patrie des gigas - ces huitres japonaises qui sauvèrent l ostréiculture française dans les années 70, faut il le rappeler ?
Ecrit par Vassof