Bordeaux
L’ouverture de notre nouvelle Salle de Concert, fin janvier dernier, permet maintenant de renouer avec la tradition des orchestres invités, laquelle, si elle se poursuit comme il est prévu, présenterait une offre culturelle, musicale, très intéressante, mettant Bordeaux au même rang que d’autres grandes villes de France (je pense évidemment à Paris, mais elle n’est pas la seule).
Rêvons un peu : Imaginons la venue du Philarmonique de Berlin ou de Vienne ! Est-ce possible ? Techniquement oui, l’Auditorium le permet. Financièrement, je suppose que cela se négocie … Quoi qu’il en soit, le 4 Avril, Bordeaux recevait l’Orchestre Philarmonique de Radio-France (O.P.R.F.) en son Auditorium et les commentaires entendus à l’entracte confirmaient tout le bien que nous pensons de cette réalisation : Belle salle, scène confortable, acoustique excellente. L’O.P.R.F., sous la direction depuis 10 ans de son chef, le Coréen Myung Whun Chung est devenu l’une des meilleures formations Européennes et le prouva en ce concert placé sous la baguette du chef d’Orchestre Finlandais MIKKO FRANCK. Programme original consacré à deux compositeurs, Stravinsky et Sibelius aux esthétiques musicales fort différentes.
- Leila Josefowicz
- photo J Henry Fair
La violoniste canadienne Leila Josefowicz, bien connue des Bordelais depuis 2007 (dans le Concerto de Beethoven) s’attaquait en première partie, au Concerto de Stravinsky qui n’est ni le plus célèbre ni le plus joué des concertos du répertoire violonistique. Hérissé de difficultés techniques pour l’interprète, privilégiant le dialogue entre le soliste et l’orchestre, il n’en reste pas moins une œuvre de Stravinsky (créée en 1931) digne de l’intérêt porté au compositeur de l’Oiseau de feu et du Sacre du Printemps. Leila Josefowicz, dans la fougue de sa jeunesse, avec sa virtuosité indestructible, en donne une interprétation passionnante, passionnée et toute en sensualité dans les deux arias où sa sonorité magnifique se prête élégamment aux vœux d’un compositeur visiblement inspiré par sa dévotion à J.S .Bach. Final éblouissant de brio. Leila Josefowicz qui joue, dit-on, un Guarnerius del Gesu, n’a rien à envier à ses consoeurs telles que Julia Fisher, Hilary Hahn ou Isabelle Faust. Elle est grande parmi les grandes, d’une brillante génération de violonistes femmes. La Symphonie n°2 de Sibelius concluait le concert et disons tout de suite que dans cette œuvre dense, sonore, nous avons pu constater que le jeune chef Mikko Franck, excellent accompagnateur dans Stravinsky, est aussi un espoir dans la galaxie pléthorique des chefs d’orchestre de valeur internationale. Signe particulier : Il dirige assis, provisoirement ou non, je ne sais. Il s’est certainement félicité d’avoir, sous sa baguette précise, une phalange qu’il connait bien et dont la valeur fut évidente ce soir là. Homogène dans tous ses pupitres, bois et cuivres dignes des Ecoles Françaises de vents, j’ai été impressionné par la qualité du quatuor à la sonorité généreuse n’excluant ni la souplesse ni la précision. Que dire de Sibelius, de sa musique en général et de sa 2ème Symphonie en particulier ? On s’est longtemps contenté de jouer sa Valse Triste et son Concerto pour violon. Depuis quelques années, il est devenu « tendance » et on redécouvre ses sept symphonies. Est-ce justifié ? Répondre oui ou non ne serait pas objectif. Donc, pour Sarastro en tout cas, il y’a doute. Musique d’inspiration nationale doublement influencée par la Scandinavie à l’Ouest et la Russie à l’Est, Sibelius (1865-1957) compose dans une époque qui a produit Wagner, pendant laquelle on découvre l’Ecole de Vienne de Schönberg et Berg, on joue Debussy, Ravel et ….Stravinsky ! La musique de Sibelius, sa 2ème Symphonie et son œuvre en général oscille entre un romantisme qui s’attarde et un relatif classicisme d’écriture. Personnellement je n’y trouve guère de hardiesse et, pour tout dire, de génie. Cela sonne bien, l’Orchestre et le Chef peuvent y déployer leurs talents, et ce fût le cas en ce 6 Avril 2013, à l’Auditorium.
Ecrit par Sarastro