Mérignac
Le décor minimaliste de Philippe CASABAN tangente l’abstraction.
Des petites maisons perchées comme des nichoirs sur des piques et posées sur des socles noirs, figurent ce quartier un peu banal, un peu miséreux, que KROUM a quitté pour partir à l’aventure.
Lorsqu’il revient, c’est pour annoncer à sa mère (l’excellente Mireille BERGER), très déçue, l’inanité de ses pérégrinations.
Interviennent alors tous les personnages qui gravitent autour de lui :
TOUGATI l’affligé interprété par un Cyril CLEDIERES formidable, l’amusante Séverine DUHAMEL dans le rôle de DOUPA la godiche ; Laurence LASKA campe quant à elle un personnage complexe, celui de TROUDA amoureuse de KROUM, elle va se résigner pourtant à épouser TAKHTI (Benjamin PEYROT) aussi à l’aise dans ce rôle que dans celui du Docteur SCHIBEUGEN. Les voisins, DULCE et sa femme FELICIA, joués par Eric BERGER et Nicole ETIENNE sont drolatiques à souhait.
Il faut aussi saluer l’hilarant Bruno BELGARRIC dans BERTOLDO et la pétulante TSWISTA (Guilhelma PRADELS-BOUTTEVILLE).
Les intermèdes musicaux arrangés par Gilles BORDONO sont délicieusement chantés par Véronique BERGE, Frédéric COPIN, Dany MACDONALD-BESSARD et Elisabeth MAGENDIE, en même temps qu’ils servent avec une grande originalité, de didascalies.
Enfin, Yann RAINEAU a la lourde tâche d’interpréter le rôle-titre. KROUM est un personnage particulièrement complexe à incarner, tant son inconsistance, son incapacité totale à intégrer sa propre humanité, son insensibilité apparente, en font un individu parfaitement odieux en même temps que pitoyable. Il fait penser fugitivement à l’Etranger de CAMUS et Yann RAINEAU parvient à rendre presque humain cet ectoplasme de KROUM et c’est là une jolie performance.
Christiane MAGENDIE est un metteur en scène qui a toujours eu à cœur de faire participer toute sa troupe, c’est une de ses signatures et c’est particulièrement ici, réussi. Une pièce surprenante et subtile donc, beaucoup plus complexe que le traitement volontairement léger de la mise en scène pourrait le laisser supposer.
Ecrit par Josette Discazeaux