Bordeaux
Alors que l’Art Nouveau dans les années 1890 à 1910 cherche dans la nature un domaine d’inspiration inédit et que de fausses roches en ciment sur une armature de fer agrémentent les jardins dès cette époque, telles les grottes de Majolan à Blanquefort, à Bordeaux, la fausse rocaille va investir les intérieurs.
Le Bar Castan … 1890
Le lieu tire son nom de son premier propriétaire et fondateur, Jean-René Castan. Ouvert en 1890 au rez-de-chaussée d’un immeuble élevé au XVIIIe siècle par les architectes Gabriel père et fils. Capitaine de corvette et négociant en épices, Jean-René Castan y fait construire construit un univers inspiré des romans de pirateries et d’imagerie exotique.
Situé sur les quais et bien connu de tous les bordelais ou presque, le bar du capitaine Castan propose à une clientèle fervente de lieux nouveaux et originaux, un atypique point de vue sur l’univers fourmillant de la rade où mouillent de nombreux navires.
Un univers onirique …
Une marquise de fer et de verre coloré, où le soleil se joue de la pluie, invite à pénétrer dans une grotte artificielle. Le rocher se développe sur un maillage de bois et de céramiques japonisants, en ce lieu où résonne l’appel du large et où naissent les multiples rêves d’un ailleurs inconnu.
Les murs sont ainsi recouverts de stalactites qui évoquent l’intérieur d’une grotte des fonds sous-marins. Le centre de la salle est occupé par un pilier en forme de palmier dont le feuillage s’épanouit au plafond.
Fresques, mosaïques de fleurs des céramistes Boulangé et Cie conçus par l’architecte Tournier, ajoutent encore à la profusion.
Le toujours très fréquenté « Grand Bar Castan » connaît depuis la rénovation des quais et sa propre rénovation en 2005 sous la direction de l’architecte Marc Benhayoun, un renouveau exceptionnel, si bien que par beau temps il est souvent très difficile d’y trouver une table de libre. Son emplacement exceptionnel, non loin des berges de la Garonne et son cachet éternellement exceptionnel, en font un lieu incontournable de Bordeaux.
Le Chapon Fin …
Alors que Dubern ouvrira en 1914, c’est à la fin du XIXème siècle que le « Chapon fin » impose son renom. En 1897, un homme du monde très éclectique, collectionneur avisé et escrimeur redouté, Louis Mendiondo, prend la direction d’un vieil hôtel-restaurant créé vers 1825 à l’angle des rues Montesquieu et Fénelon, le Chapon fin.
A ses débuts, simplement fréquenté par les habitués du quartier et les acteurs du Théâtre Français, l’établissement est reconstruit en 1844, et un hôtel lui est adjoint. Mendiondo va tout bouleverser en faisant appel à Cyprien-Alfred Duprat, jeune architecte qui va composer pour le restaurant un extraordinaire décor de rocaille, tout en conservant dans le centre du restaurant, le dernier des platanes plantés au XVIIIème siècle sur ce terrain alors occupé par le couvent des Récollets.
La Belle Epoque …
A la Belle Epoque, il faut appartenir au sérail pour espérer obtenir une table, Sarah Bernhardt, Toulouse Lautrec, le roi Edouard VII, Alphonse XIII qui finira par y avoir sa cave particulière, furent parmi les hôtes prestigieux du célèbre restaurant.
En 1901 Mucha, entrainé par Maurice Desbans, critique d’art de la « Petite Gironde », paye son écot en exécutant deux panneaux peints destinés à l’entrée du restaurant où dîne Toulouse-Lautrec avant de se rendre au Grand-Théâtre ou d’aller peindre rue Porte-Dijeaux dans la réserve du marchand de tableaux Imberti.
Sem en compagnie de Paul Berthelot essaye au Chapon fin un talent de dessinateur qui trouvera la consécration à Paris dans la fréquentation du Maxim’s. Après le deuxième passage du gouvernement de la France à Bordeaux, en 1914, le Chapon fin deviendra le plus célèbre restaurant de Province.
Sources (101 objets et symboles qui racontent Bordeaux).
Ecrit par Dominique Mirassou