Bordeaux
Le musicien, producteur, auteur et comédien de doublage Pierre-Alain de Garrigues, dit “PADG”, a rencontré ses fans au Parc des exposition lors du Bordeaux Geekfest le week-end du 18 au 19 mai 2024. Une figure de la publicité et du jeu vidéo qui parle sans tabou de sa vision du métier aux petits comme aux grands.
Même enrouée comme elle l’était samedi 18 mai à la convention pop culture du Bordeaux Geekfest, la voix de PADG est facilement reconnaissable. Parfois, on ne sait comment. Sans doute car Pierre-Alain de Garrigues prête sa voix à 45 000 enregistrements provenant majoritairement de pubs et personnages et jeux vidéo. Tic-Tac, Trésors de Kellog’s, Adibou, la première voix des Lapins crétins, c’est lui. Un parcours aux multiples chemins qui ne date pas d’hier.
Sa première grande passion est pourtant la musique, qu’il commence en jouant sur « une batterie que m’a offerte mon parrain quand j’avais huit ans, rembobine le comédien originaire de Mimizan, dans les Landes. Et comme j’étais l’ainé, les élèves sont arrivés. J’ai fini par monter un groupe avec mes deux petits frères. Et quand tu montes des groupes de famille, c’est souvent l’ainé qui chante. Ce qui va m’ouvrir un champ de technicité en travaillant mon sens rythmique et mélodique. C’est ce qui va être le truc le plus utile pour le métier que je ferai plus tard. »
De la musique à la pub
Une fois à la vingtaine, PADG entame des études en littérature et philosophie, qu’il délaisse pour se « consacrer un an à la musique. Ma mère me voyait plutôt professeur, mais un jour, j’en ai eu marre. J’ai d’abord joué avec pas mal de groupes de l’Est, où mes parents avaient déménagé, avant de monter sur Paris. »
C’est là-bas qu’il intègre le « show-business » en jouant et chantant dans des chœurs sur des plateaux télé, « ce qui était très recherché à l’époque. » C’est lors d’une ces séances de répétition que sa carrière va prendre un autre tournant.
« J’ai eu la chance pas croyable de répéter à côté d’un tournage de pub qui ne se passait pas bien. Ils ont fini par virer le mec et aller voir du côté des chœurs pour voir s’il y avait un autre comédien. Tout le monde m’a désigné non en disant que j’étais doué, mais en disant que je faisais bien le con ! » Il fait par la même occasion la connaissance du réalisateur Jean Becker, qui le prendra sous son aile et le transformera en un an en « Monsieur pub ».
@padg_officiel Pour ceux qui en doutait ! #vraievoixtictac#tictac#publicité#pub#lol#aubergiste#comedien#voixoff#doublage#padg ♬ son original - Pierre Alain de GARRIGUES
« Pas énormément de différences entre doubler de la pub et du jeu vidéo »
Sa réputation arrivera aux oreilles des éditeurs d’un jeu vidéo dans les années 90, « à l’époque des CD-ROM », qui demanderont au comédien de doubler « un petit personnage qui apprendrait aux enfants, le français et l’anglais et l’histoire. C’était Adi ». Il participe de fil en aiguille à de nombreux doublages de jeux vidéo tel que Rayman ou Little Big Adventure « à une époque où on ne pensait pas que le jeu vidéo deviendrait une force économique mondiale. »
Le comédien est souvent appelé « car je vais assez vite, je sais inventer des choses. C’est différent du doublage de film, où les comédiens devaient être rassemblés autour d’un même micro. Ils en avaient pour deux ou trois semaines à le faire. Pour le jeu vidéo, il fallait aller vite pour ne pas perdre d’argent. C’est pour ça que pas mal de gens de la pub ont travaillé dans les premiers jeux vidéo. »
C’est essentiellement grâce au doublage de jeux que PADG se retrouve « un peu sans le vouloir au cœur de la hype du doublage » et se fait connaître auprès d’un public plus jeune. « Ce sont des voix qui deviennent dans l’inconscient collectif, ou le conscient collectif des geeks, importantes. C’est comme ça que je me retrouve à faire des vidéos avec des copains comme Squeezie ou Cyprien. Quand j’ai rencontré Bigflo sur le tournage de TheVoice, je me suis aperçu qu’il connaissait toute ma carrière ! »
Une personnalité du doublage met en garde sur l’avenir de son métier
Il aime aussi discuter de sa carrière à ses fans en conventions, qui l’interrogent le plus souvent sur le métier de comédien de doublage. « Sur 100 personnes que je vois en dédicace, une trentaine vont me poser des questions sur les difficultés et les qualités qu’il faut avoir pour être dans le métier. Je suis toujours très positif, mais je mets en garde contre cette hype perpétuelle. », assure le soixantenaire.
« C’est difficile de remplacer des Ferraris par des Twingos. Imaginons que tu es pâtissier, que tu es super doué, et qu’on te dit aussi que tu l’es. Tu vas ensuite vouloir ouvrir une pâtisserie. Sauf que dans la rue où tu veux l’ouvrir, il y en a déjà 30. Comment tu fais pour débarquer alors que les 30 autres ne sont pas de mauvais pâtissiers non plus ? Car tous les producteurs connaissent ma pâtisserie, celle de Donald Reignoux, etc. Alors évidemment, la rue est beaucoup plus grande maintenant. Il y a de nouvelles productions, de nouvelles chaînes de télé. Mais même elles veulent prendre des gens connus pour aller vite et éviter de perdre de l’argent. », image le comédien.
S’il déconseille ce milieu, il ne décourage pas ses fans à faire carrière dans d’autres milieux artistiques. « Soyez réalisateurs, scénaristes, monteurs, faites des trucs à la fois techniques et d’écriture. Soyez multicarte comme je le suis ! »
Ecrit par Antonin Besnard