A lire et à méditer …. Les « pathologies politiques françaises » par Alain Duhamel.

Entre inconstance, déclinisme, égalitarisme, nationalisme, conservatisme, extrémisme, intellectualisme, la vie et le caractère politique français semblent bien souffrir depuis longtemps de multiples pathologies leur conférant une allure très caractéristique. Entre défauts et qualités propres à notre peuple, Alain Duhamel nous propose de déchiffrer les spécificités du tempérament politique des Français, de mesurer son impact, sa force et son originalité.



Inconstance, déclinisme

Nul doute qu’il y a face à la crise, une manière typiquement française de l’amplifier, de la vivre, et de la concentrer sur le terrain politique et l’auteur d’ajouter que le tempérament des Gaulois n’est pas sans influence sur l’intensité de la crise.

Il constate et argumente pêle-mêle que la plus grande permanence française c’est l’inconstance. La passion immuable du changement est vécue en France comme une religion de l’instabilité. Entre 1789 et 2016, la France aura produit et consommé quinze Constitutions et donc quinze régimes, triste record et de citer Machiavel :

« L’homme n’est pas un être de raison et d’harmonie mais de désirs et d’insatisfaction. »

Les Français ont été tour à tour monarchistes, révolutionnaires, bonapartistes, républicains et la France, fille ainée de l’Eglise, selon la formule consacrée, est devenue la nation la plus déchristianisée d’Europe.

Quant au pire défaut de notre pays selon Alain Duhamel, le plus destructeur, le plus persistant, c’est le déclinisme et de citer César : « qui déjà décrivait les Gaulois comme vaillants et hardis mais prompts au découragement, doutant de leur destin. »

Déclinisme français de tous temps, de toutes les strates de la société, masochisme collectif, pessimisme congénital, mélancolie nationale, faiblesse cardinale de notre pays à laquelle selon l’auteur, seule une ambition collective claire portée par une autorité légitime est susceptible de remédier.

Egalitarisme, Nationalisme

Les Français ont toujours eu la passion de l’égalité et la tentation de l’égalitarisme. En France l’égalité prime sur la liberté. Plus égalitaire que tous les autres pays à l’exception de la Suède, la France qui consacre 33% de son PIB à la protection sociale est avec un taux de prélèvements (impôts et cotisations sociales) de 47% loin en tête de toutes les nations.

Alors que l’idéologie française est antimondialiste, l’idéologie mondialiste est anti égalitaire, rappelle l’auteur. Pays où l’égalité compte le plus, mais aussi pays où le sentiment d’inégalité est le plus élevé, la France, à la fois de plus en plus égalitaire et de plus en plus élitiste, vogue tant bien que mal entre démagogie populaire et arrogance élitaire.

Quant au nationalisme, hostilité de principe à tout ce qui vient de l’extérieur, agressivité perpétuelle vis-à-vis des autres pays, l’auteur rappelle en citant Romain Gary : « Le patriotisme, c’est aimer les siens, le nationalisme, c’est détester les autres. » et de poursuivre : « Il y a dans le nationalisme d’extrême droite un talent particulier pour exploiter les ressources sans fin de l’imaginaire, du fantasmatique et même du conspirationnisme. Le nationalisme voit des complots partout, des mensonges partout, des censures partout et, bien sûr, des manœuvres obscures qui le visent. »

Ainsi au niveau de l’Europe, faute de se simplifier, de s’alléger, d’aller à l’essentiel et d’organiser un grand débat démocratique public, l’Union Européenne ne pourra, selon l’auteur, que faire le lit des nationalismes, à commencer par le nationalisme français. Et de prôner une France non pas chauvine mais déterminée et solidaire, une unité nationale forte et déterminée face au nationalisme.

Conservatisme, Extrémisme

Conservatisme patronal et conservatisme syndical s’alimentent mutuellement, ils sont les frères siamois, dans une France encore allergique aux réformes et faisant que souverainistes, déclinistes, nationalistes ou nostalgiques gagnent en ce moment haut la main la bataille des idées. De quoi penser que si les Français se mettent lentement en marche vers l’évolution, ou plutôt l’adaptation, ils ne le font pas parce qu’ils le souhaitent mais parce qu’ils savent qu’ils le doivent et l’auteur de citer Jean Monet dans ses Mémoires publiées en 1976 :

« Le choix est simple : modernisation ou décadence. »

Et d’ajouter : « La France fonctionne comme un moteur à explosion parce que ses freins restent bloqués. Son progressisme brille et scintille mais son conservatisme domine et règne.

Le tempérament national qu’en pleine tempête le Général de Gaulle définissait par « la hargne, la grogne et la rogne » l’a régulièrement emporté. Il a constitué le terreau sur lequel ont prospéré tous les extrémismes. De souverain en souverain, de pouvoir en pouvoir, de gouvernement en gouvernement, l’extrémisme a toujours été une composante du système politique français. Et de constater que rarement moins de 20% des électeurs, souvent 30% et aujourd’hui près de 40% des citoyens pauvres ou menacés de déclassement se rallient à des thèses extrémistes.

Selon l’auteur, jamais la France ne s’est trouvée ainsi en pareil danger d’extrémisme depuis 1945. « La xénophobie affleure et contamine irrésistiblement les classes populaires. Le populisme émerge à l’extrême gauche et surtout à l’extrême droite. » Les élites sont éreintées, la démagogie prospère et l’extrémisme s’installe. Les circonstances n’ont jamais été aussi favorables à l’extrême droite.
Alain Duhamel
Intellectualisme

Alors que selon Alain Duhamel, la politique française se pique d’intellectualisme en des débats passionnés, à Paris dit-il, l’éthique de conviction l’emporte toujours sur l’éthique de responsabilité. Je crois donc je suis est le mot d’ordre sous toutes les majorités. En France, la lutte des idées domine la lutte des classes, toutes les utopies, toutes les croyances toutes les chimères s’affrontent et se combattent, les fantasmes pèsent plus que les intérêts, les idées, les représentations, les mythologies règnent, pour le meilleur comme pour le pire, qu’elles soient justes ou fausses.

Et l’auteur de préciser que malgré tout : « Reste qu’actuellement on ne peut plus soutenir que le « pouvoir spirituel », pour reprendre l’expression d’Alain, appartient aux hommes politiques. L’influence des intellectuels sur le débat politique apparaît cependant nettement plus marquante que l’influence des hommes politiques sur le débat intellectuel. » Et Alain Duhamel de s’interroger sur les différents rôles que peut tenir l’intellectuel en politique ….

Et de conclure par ces mots de Pierre Nora :

« La France est fatiguée d’elle-même. Et si elle était en réalité furieuse de ne plus être ce qu’elle a été et anxieuse de redevenir ce qu’elle est capable d’être : une nation marquante depuis longtemps et originale pour toujours. »

« Les Pathologies politiques françaises » d’Alain Duhamel de l’Institut, un livre à lire sans aucune hésitation, car la France c’est aussi des qualités : l’imagination, l’idéalisme, l’originalité, la fierté, l’indépendance etc …. Une nation qu’en 1856 Tocqueville décrivait comme « la plus brillante et la plus dangereuse des Nations de l’Europe. »

Ecrit par Dominique Mirassou


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