Bordeaux

L’architecture bordelaise est souvent considérée comme une architecture classique, que ce soit pour ses façades bourgeoises du XVIIIème siècle, ou ses échoppes ouvrières du XIXème siècle. Néanmoins, certaines réalisations tendent à montrer le contraire, hissant Bordeaux au rang de ville moderne. Les premières d’entre elles s’inscrivent dans le contexte de l’industrialisation, dont les matériaux phares sont le verre et le fer.



Ce que l’on appelle la Révolution industrielle est propre à l’Angleterre, qui dès la fin du XVIIIème siècle entre rapidement dans un modèle de société différent, les autres pays ne changeront que de manière progressive leur structure sociale. Le Royaume-Unis utilise d’ailleurs avant tout le monde de manière total et non partiel le fer dans ses constructions. Le premier pont métallique au monde est réalisé entre 1773 et 1779 par Abraham Darby, un britannique, près de sa fonderie à Coalbrookdale. C’est une des raisons pour lesquelles cette nation accueille en 1851 la première Exposition universelle. Cet événement est l’opportunité pour les pays européens de montrer leur puissance industrielle, à ce jeu là le Royaume-Unis l’emporte avec le Crystal Palace, alors la plus grande serre jamais édifiée. Cette cage de verre et de métal héberge l’ensemble de l’exposition, éblouissant par la même occasion les visiteurs : 92 000 m² de surface, couvert par 4210 tonnes de métal et de verre ! Le Crystal Palace marque les esprits, et rend possible toutes ambitions, en particulier dans la façon d’utiliser ces « nouveaux » matériaux.

Le Crystal Palace vaste palais d’exposition en fonte et verre d’abord édifié à Hyde Park

En 1898 est élevé à Bordeaux l’une des plus grandes verrières métalliques d’Europe : 296,96 mètres de long sur 57,70 mètres de largeur, 26 mètres étant sa plus grande hauteur. Il s’agit du plafond des quais de la gare du Midi (ancien nom de la gare St-Jean). Plusieurs gares desservaient la ville : la gare de Bordeaux-Ségur vers Saint-Genès qui allait jusqu’à la Teste, et la gare d’Orléans au niveau de la Bastide qui reliait Bordeaux à Paris. Toutes ont disparu au profit de la gare appartenant à la Compagnie du Midi qui desservirait à présent toutes les lignes. Cette gare au départ provisoire, construite en bois reste de nos jours la gare principale de Bordeaux. Elle témoigne de l’ambition de cette compagnie alors la plus importante du Sud-Ouest, d’avoir une renommée en dehors des frontières françaises. Le classicisme est encore présent sur ses murs, mais pour ses constructeurs elle participe à cette futur gloire. Le classicisme ne s’oppose pas ici à la modernité du fer et du verre, les deux se complètent : « Cette gare doit être une construction qui ait un caractère monumental, tout en gardant une simplicité dans les lignes et surtout dans les détails décoratifs », lettre de l’ingénieur Choron à l’architecte du projet Toudoire, le 25 juillet 1893. Les lignes de fer se mêlent aux lignes de pierre, l’ensemble accentué par les quelques sculptures de Gaston Veuvenot-Leroux et de Charles Beylard.

Verrière de la gare Saint-Jean de 296,96 mètres de long sur 57,70 mètres de largeur et 26 mètres de haut

L’harmonie entre le classique et le moderne est également perceptible à travers les passages couverts du centre ville. Ils sont aux nombres de deux aujourd’hui, il s’agit du passage Sarget et de la Galerie Bordelaise. Nous concentrerons sur le deuxième exemple datant de 1834, ceci correspond à la période du développement de ce type de structure. En effet, sa nature d’abri permet aux passants de se restaurer ou de se promener peu importe le temps. L’évolution de l’industrie invite à ce genre de nouveaux chantiers qui accueillent les nouveaux magasins de prêt à porter et autres commerces. Les emplacements choisis sont les quartiers commerçants de la ville en général. L’architecte de la Galerie bordelaise est Gabriel-Joseph Durand, il s’inspire de la galerie Vivienne dans le 2ème arrondissement de Paris, qui est elle d’une plus grande superficie. Néanmoins nous n’avons à rougir de ce passage dont la verrière éclaire avec justesse les passants : lumière zénithal qui laisse des coins de pénombre pour se rafraîchir, le tout marqué par le style Premier Empire avec ses reliefs aux motifs antiques, et sa polychromie aux couleurs impériales (vert, rouge, or). Ce chemin, allant de la rue Sainte-Catherine à la rue des Pilliers-de-Tutelle, prouve encore une fois qu’il est possible d’allier deux architectures différentes sans que l’unes annihile l’autre.

Galerie Bordelaise

Sources :
Gabrielle MELISON-HIRCHWALD, « Les couleurs du pouvoir politique sous le ciel parisien » [article], Romantisme, 2012/3, p.75-88.
Georges POISSON, « Napoléon et les grands travaux. L’architecture métallique » [article],Revue du Souvenir Napoléonien, 2002, p.45-48.
Henri POUPÉE, « ARCHITECTURE (Matériaux et techniques) Fer et fonte » [article], Unviversalis.fr.
Jean SENTOU, « Bordeaux au XIXe siècle » [compte-rendu], Annales du Midi, 1970, p. 310-311.
Marc SABOYA, Bordeaux, Les formes du désir : un abécédaire pour voir la ville autrement, Ed. Le Festin, 2018.
Paul PÉLISSIER, « Le rôle des voies ferrées dans le paysage de Bordeaux-Bastide »
[article], Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest. Sud-Ouest Européen, 1950, p. 221-233.
Site de memoire-ferroviaire-bordeaux.fr.
Yers KELLER, Carnets bordelais, Ed. Asa.


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