Bordeaux
Madeleine Cormier, familièrement appelée Manon, naît à Bordeaux le 27 août 1896, quelques instants après son frère jumeau Henri, dans une famille de la bourgeoisie protestante liée au milieu de la banque. Son père Jules Cormier, maire de Bassens y dirige l’agence du Crédit Lyonnais.
Brillante et énergique …
Brillante élève au Lycée Mondenard où elle rafle tous les prix, elle apprend seule et en secret le latin pour passer le baccalauréat classique, elle va être l’une des trois premières femmes à s’inscrire à l’université de droit de Bordeaux.
Le premier drame de sa vie survient le 20 janvier 1917 lorsqu’elle apprend que son frère jumeau Henri vient de tomber au Champ d’honneur. Suite à ses études, elle va choisir le métier d’avocate puis entrer dans l’Administration.
La cause féministe …
Attachée au Cabinet du ministre des pensions, Louis Marin, un républicain défendant la cause féministe, Manon Cormier, en véritable suffragette, milite pour le vote des femmes et crée en Gironde « La Ligue française pour le droit des femmes ».
Engagement courageux soumis aux sarcasmes et aux moqueries ainsi qu’à la répression policière à l’égard des partisanes du vote des femmes.
En 1934, Manon Cormier publie « Madame Juliette Adam ou l’aurore de la Troisième République » en hommage à cette féministe qui tenait depuis 1887, un salon à Paris où se rassemblaient les chefs républicains.
La Résistance …
A la déclaration de la seconde guerre mondiale en 1939, Manon Cormier travaille au ministère du Ravitaillement. Très vite, elle rentre dans la Résistance, établit de faux papiers, héberge des communistes et des réfractaires au S.T.O. (Service du travail obligatoire) en Allemagne.
Dénoncée par la police française le 30 septembre 1943, elle est arrêtée par la Gestapo dans les locaux du Ministère puis transférée à Bordeaux. Incarcérée au fort du Hâ, elle est interrogée par le sinistre et brutal commissaire Poinsot qui la condamne à la déportation en Allemagne, nous sommes en mars 1944.
Les camps de concentration …
Envoyée au camp de concentration pour femmes de Ravensbrück, elle est immédiatement intégrée dans un Kommando de travail. Malgré un très mauvais état physique, elle ne cesse de soutenir ses compagnons d’infortune, en leur prodiguant des conférences sur l’histoire.
Lors de l’avancée des troupes alliées, alors que les nazis entassent les prisonnières dans des wagons, les troupes américaines découvrent Manon Cormier au camp de Mauthausen dans un état de total épuisement. Rapatriée en avril 1945 dans un camion de la Croix-Rouge, sur le chemin du retour, à Annecy, bien que jugée très faible par le médecin pour être transportée, elle insiste pour rejoindre Paris.
Transférée à l’Hôpital Boucicaut, elle s’éteint le 25 mai 1945 après avoir concentré toutes ses forces pour transmettre aux générations futures son témoignage sur les camps de la mort.
Manon Cormier repose au cimetière protestant de la rue Judaïque, au côté de son frère jumeau avec, pour tous les deux, la mention « Morts pour la France ».
Ecrit par Dominique Mirassou